Jean-Christophe Béchet

Les quartiers de gare ont en commun cette dualité, cette dureté que Jean-Christophe Béchet restitue dans ses images de la gare centrale de Tokyo, tantôt avec la richesse du noir et blanc, tantôt avec la pauvreté paradoxale de la couleur restreinte à une grisaille bleutée déchirée d’éclats chauds et violents.

TOKYO STATION

Urbi & Orbi – 2008 – Maison d’accueil du Pays sedanais – Sedan

 

C’est là que bat le pouls de la ville. La gare polarise le quartier qui l’entoure. Elle exerce son tropisme sur les foules qu’elle aspire, sur les voies de communication qui y convergent. Elle est lieu de passage autant que d’attente : ici se côtoient les flux et l’immobilité, l’anonymat des voyageurs et la familiarité d’une population profondément enracinée de petits commerçants, d’employés, de vendeurs à la sauvette, de clochards.

Les quartiers de gare ont en commun cette dualité, cette dureté que Jean-Christophe Béchet restitue dans ses images de la gare centrale de Tokyo, tantôt avec la richesse du noir et blanc, tantôt avec la pauvreté paradoxale de la couleur restreinte à une grisaille bleutée déchirée d’éclats chauds et violents. Mais ce que la capitale japonaise offre de spécifique au regard étranger, c’est son rythme que traduit la succession scandée des images, un désordre particulier accentué par la couleur, où se côtoient des restes d’urbanisme ancien et les réalisations les plus modernes. Espaces confus, ambigus, rues sans nom, profusion de signes énigmatiques, réseau arachnéen de fils électriques: tel est le décor où s’inscrivent l’urgence des pas, l’égarement des visages, l’accablement des épaules, l’appel brutal du sexe, le coma des dormeurs omniprésents, la cacophonie des téléphones portables, la blancheur immaculée des passages piétons et des gants des policiers.

Si Jean-Christophe Béchet tient à distance ceux qu’il photographie, c’est que, comme il le dit lui-même, il a «besoin de se sentir étranger pour mieux voir ». Il ne nous livre ni la vision d’un sociologue, ni celle d’un urbaniste mais celle d’un simple passant aiguisée par le dépaysement.

Jean-Christian Fleury

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