Sandra Solinski

Sandra Solinski photographie ses sujets tantôt de dos, dans la contemplation de ce lieu si important pour eux, tantôt dans un contre-champ, de face, laissant percer l’émotion et surtout la gravité avec laquelle ils vivent cet instant de retrouvailles.

Géographies sensibles

Urbi & Orbi – Promenade urbaine – Place d’Armes – Sedan

 

Sandra Solinski s’interroge sur « ce qui fait qu’une ville est nôtre ». Cette « possession » implique, plus qu’un contenu administratif ou l’aléa de la naissance, une relation affective, une histoire dont la ville est à la fois le cadre et l’un des protagonistes.

A Sedan, elle a demandé à des habitants de tous âges et de différents quartiers quel était le lieu de la ville le plus important pour eux, autrement dit, celui qui avait le plus compté dans leur vie, celui qui leur manquerait s’ils devaient quitter la ville. Leur rapport à ces lieux est avant tout déterminé par des événements personnels, le plus souvent heureux ou remémorés comme tels, et presque toujours anciens. Tel rocher au pied d’un immeuble, telle ligne infranchissable dans la cour de l’école primaire, tel bar lié aux rituelles parties de belote sont indissociables de moments joyeux de camaraderie. L’eau exerce son habituel tropisme, particulièrement sur les amoureux et les solitaires : le lac de la Z.U.P. ou les bords de la Meuse sont souvent cités mais chaque fois pour des localisations différentes. « Quand on change une ville, on change le visage de ses habitants » déclare une habitante de quatre-vingt-treize ans chez qui la question suscite la nostalgie, voire la douleur car les lieux de référence des personnes âgées n’existent souvent plus sinon par l’évocation qu’ils en font. Toute rénovation urbaine est aussi un deuil.

Sandra Solinski photographie ses sujets tantôt de dos, dans la contemplation de ce lieu si important pour eux, tantôt dans un contre-champ, de face, laissant percer l’émotion et surtout la gravité avec laquelle ils vivent cet instant de retrouvailles. Suspendues à des filins au-dessus de la Place d’Armes, ces images livreront aux Sedanais une géographie affective qui a peu à voir avec celle des touristes ou sur laquelle travaillent les édiles.

Jean-Christian Fleury

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