Sasha Anisimova

Depuis le printemps 2020, une graphiste ukrainienne se réapproprie sa ville à travers des illustrations délicates et frappantes à la fois. Sasha Anisimova a 30 ans et a dû fuir la ville de Kharkiv. Sur son compte Instragam aux lignes claires, la jeune femme partage son travail et son quotidien. À l’aide de sa tablette graphique elle apporte un peu de vie sur des photos de sa ville en ruines suite aux ­attaques et aux bombes.
Aujourd’hui, la graphiste est réfugiée à Tcherkassy, au sud-est de Kiev.

Avant la guerre, je dessinais des illustrations et des cartes postales familiales mais, maintenant, les thèmes de mes dessins ont changé à cause des évènements horribles affectant mon pays.
Mes illustrations sont très simples. C’est peut-être pour cela que tant de gens les comprennent. Il y a plus d’un an, la Russie a déclaré la guerre à mon pays. Nos villes sont en ruine, leurs habitants meurent. Dans le monde entier, des médias diffusent des photos de tués, de blessés, de gens souffrants, terrorisés et de villes détruites. Je sais que c’est difficile de prendre conscience de ce qu’il se passe dans un autre pays à travers des photographies, et c’est peut-être pour cela que beaucoup de gens pensent que certaines informations sont fausses.
Mes dessins traitent de la vie que nous avons perdue. Beaucoup d’Ukrainiens ont perdu des membres de leur famille, des amis proches, et c’est là une douleur effroyable, une perte inoubliable. Et tous les Ukrainiens sans exception ont été privés de leur vie normale.
J’ai utilisé des photographies de Kharkiv en ruine comme arrière-plan à mes illustrations ; elles dépeignent des activités banales de la vie quotidienne comme boire un café, promener le chien, prendre une douche, faire de la gym ou du yoga, toutes nos routines de chaque jour. Les silhouettes sont tracées au moyen de lignes toutes simples, parfois coloriées de teintes presque transparentes. Ce ne sont pas des fantômes, mes dessins ne représentent pas des morts, mais comme un rêve de normalité.
J’essaye de montrer les vies que nous avons perdues et que nous voulons récupérer.
Les Russes nous ont volé nos vies, mais ils ne peuvent nous voler notre énergie.

Share This
google-site-verification: google0efd31106259eb58.html